LA MUSIQUE CONGOLAISE, ORPHELINE DE SES SPONSORS ?
Ces dernières années, les groupes musicaux congolais connaissent une période de véritable disette faute de bénéficier du soutient matériel, logistique et financier qui pourrait leur permettre de décoller et ainsi tenir tête, comme par le passé, à leurs homologues étrangers.
En effet, les hommes d’affaire et les opérateurs culturels congolais ignorent royalement (consciemment ou inconsciemment) nos musiciens pourtant talentueux, préférant faire la part belle aux artistes étrangers qui ont trouvé au Congo Brazzaville, un filon d’or qu’ils se mettent à exploiter tous azimuts.
Faut-il alors donner raison à l’auteur du poème Artristes représenté sur scène le 27 mars 2014 à l’Institut Français du Congo, à l’occasion de la célébration de la 52eme Journée mondiale du théâtre, par les élèves du Groupe Scolaire Sacré Cœur lorsqu’il s’écrie :
« Les magnats ont de la poudre aux yeux.
Eux qui se prenaient pour de vrais dieux,
Ils sont tombés dans le piège de la facilité
Victimes d’une sordide duplicité. » ?
Comment expliquer, en effet, que les opérateurs culturels congolais affectionnent et encouragent, à grand renfort de dizaines de millions de francs CFA, des musiques à la limite « pornographiques » et qui n’apportent rien de substantiel au commun des mélomanes ?
Pourquoi diable laisse-t-on au rancart tous ces musiciens intelligents qui vous concoctent des rythmes envoûtants pour tourner ses yeux vers ces musiques fades et frelatées qui nous viennent de l’étranger ?
En tout cas, emboîtant le pas à Delmas PENE, animateur et chroniqueur musical à la télévision nationale, nous lançons un véritable cri d’alarme, s’il en faut, à l’endroit des hommes d’affaires et opérateurs culturels congolais pour les exhorter à faire attention à ce qui se fait autour d’eux avant d’aller regarder ce qui vient d’ailleurs – et en la matière, Beethoven Yombo Germain est un exemple à suivre. « Tout ce qui brille n’est pas or », dit le dicton.
Chers opérateurs culturels congolais, l’or n’est pas aussi loin que vous voulez aller le chercher mais là, tout près, sous vos pieds.
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UNE CHAUDE JOURNÉE MONDIALE DE THÉÂTRE
Le 27 mars 2014, l’humanité a célébré la 52ème Journée Mondiale du Théâtre. A Brazzaville l’événement avait eu pour cadre l’Institut Français du Congo.
Très tôt en matinée, les jeunes troupes des lycées Savorgnan de Brazza, Lumumba et Sacré Cœur étaient montés sur les planches pour présenter tour à tour en une heure, un spectacle à thèmes variés où se mêlaient jeux dramatiques et danses chorégraphiques.
L’occasion était donnée de découvrir des jeunes comédiens talentueux. Le public a pu voir sur scène des jeunes adolescents capables de libérer des charges émotives comme le ferait des comédiens de haut niveau.
Le soir à 19h00 la fête a monté d’intensité.
Conformément à la tradition, l’artiste Christelle a donné lecture du message international, écrit par le dramaturge et metteur en scène Brett Bailey. Un message où l’auteur exhorte les artistes du monde à se rassembler pour célébrer avec nos idées, nos cœurs et nos corps la richesse culturelle de nos différentes cultures et aussi, pour dissoudre les frontières qui nous divisent.
Vive Foulani !
Juste après cette brève cérémonie, le public venu très nombreux est pris d’enthousiasme avec la représentation très attendue, par le théâtre Négropolicongo des 3 Francs, de « le pagne », une pièce écrite et mise en scène par Alphonse Mafoua. Le décor bien planté sur scène est fait de deux pièces d’artisanat symbolisant l’intérieur d’un modeste appartement, nous indique que nous sommes bien à Foulani une ex colonie portugaise.
Une structure légèrement décentrée qui a permis de situer un intense jeu dramatique, construit tantôt dans la maison, tantôt dans la rue, tantôt dans un coin, côté jardin, où l’on pouvait voir deux ivrognes aux paroles plus que sensées.
Le texte encore inédit, offre un panorama qui dévoile les valeurs et les antivaleurs qui jalonnent le chemin de l’ascension sociale, à travers le choc de deux conceptions du monde diamétralement opposées : le conformisme et le non conformisme.
Mam’Zohra recommande à sa fille et à sa nièce de prendre les chemins classiques indiqués par les « mpoutouloukezo » (appellation déformée de portugais); chemins qu’emprunte tout bon colonisé qui espère une ascension sociale sous le néocolonialisme.
Tandis que sa fille Johta lui voue une obéissance de chien, sa nièce Amenecie préfère s’engager dans les contres voies ; en faisant tout le contraire de ce qu’on attend d’elle. Le jeune Cloclo, le soupirant, qui tente d’entrer dans la vie de l’une et de l’autre jeune fille, constate avec amertume que même le pagne, le plus grand fétiche de la femme, ne fait plus son petit effet magique chez ces êtres là.
Une véritable empathie s’est installée dans la salle. On la doit à la dextérité de la mise en scène mais surtout au talent des interprètes pour la plupart sortis à peine de l’adolescence. L’héroïne, Amenecie, est incarnée par Jornelie Louhoua (16 ans) dont le premier pas sur une scène professionnelle n’a pas tremblé. A côté d’elle Verêve Mafoua, Chaldie Kinzonzi, Vivaldi Chamanda Malonga, ThalèsZokene, Anaël Nkéoua et Lémy-Barth Bantsimba ont été les grands au cours de cette soirée où le public lui-même a repris en cœur : vive Foulani !
La fête était belle. On retiendra la capacité du Théâtre Négropolicongo des 3 Francs à mobiliser, dans un élan de solidarité, les entités nationales du théâtre vivant autour de concept de « journée mondiale du théâtre » qui, une fois de plus a tenu son pari.
Artistiquement votre.