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8 décembre 2010 3 08 /12 /décembre /2010 02:03

Par Alexis BEMBA BONDO MUKELE

Alexis BEMBA BONDO MUKELELa situation ivoirienne doit nous ouvrir les esprits afin de comprendre, une fois pour toute, que la démocratie, comme le dit le professeur BICHARA KHADER, est une culture qui trouve son point d’ancrage au sein du foyer, en passant par la vie de tous les jours-par l’acceptation et la critique de l’autre sur base argumentaire et factuelle, par le parti politique avant d'être érigé en système de gestion au somment d'un état.

La situation ivoirienne met en lumière deux choses essentielles. Tout d'abord, l'Africain demeure dans la culture tribale du pouvoir. On vote plus par rapport à son origine, à sa tribu ou à sa province que sur base d'un programme politique donné et défendu par le candidat à l'élection présidentielle. Les gens du nord soutiennent Alassane Dramane OUATTARA alors que ceux du sud prennent position pour Laurent GBAGBO, avec le risque d'embrasement du pays dans les jours qui viennent. 
Ensuite, le comportement de Laurent GBAGBO doit nous amener à nous interroger sur les motivations des leaders d'opposition africains. Lorsqu'ils se retrouvent dans l'opposition, la plupart d'opposants africains font des critiques acerbes, généralement légitimes, de ceux qui détiennent le pouvoir. Mais, une fois aux affaires, il leur est difficile de matérialiser les idées qui étaient les leurs pendant les années d'opposition. Ils s'interdisent toute alternance qui fut pourtant leur crédo lorsque le fauteuil présidentiel n'était pas à leur portée. Ils deviennent par la force des choses, aussi dictateur que leurs prédécesseurs.

Deux cas éloquents me poussent à ce constat. Il s'agit d'Abdoulaye WADE du Sénégal et de Laurent GBAGBO de la Côte d'Ivoire.

Sous Léopold SEDAR SENGHOR et Abdou DIOUF, Abdoulaye WADE était sur toutes les scènes communicationnelles, vilipendant l’un et l’autre et faisant croire aux Sénégalais que son passage à la tête de l’état apporterait un vent nouveau sur la scène politique sénégalaise.

Voici dix ans qu’Abdoulaye WADE dirige le Sénégal sans que sa présence n’ait apporté le vent nouveau, "Sopi", qu’il avait clamé contre Abdou DIOUF. Pis encore, alors qu’il est à son deuxième mandat, il voudrait profiter de la nouvelle constitution sénégalaise pour postuler un troisième mandat. Il ne tient compte ni de son âge, 84 ans, ni de deux mandats déjà à son actif. Et au-delà de cette tendance à demeurer indéfiniment au pouvoir, il crée déjà des conditions pour passer le flambeau à son fils, Karim WADE.

Ceux qui ont suivi l’ancien ambassadeur français à Dakar sur France 2, M. RUFFIN, savent que ce dernier a été relevé de ses fonctions pour avoir attaqué Karim WADE qui mettrait beaucoup d’argent au bénéfice des réseaux françafriques afin de le soutenir pour succéder à son père, comme si le Sénégal était une république monarchique ou dynastique. Et ce, à la suite de la RD Congo 2001, du Togo, 2005, et du Gabon, 2009.

Abdoulaye WADE qui avait critiqué dans des propos acerbes la classe politique zaïroise, sous MOBUTU lors des accords du palais de Marbre pendant les années’90, est loin d’être le meilleur homme politique africain au vu de sa gestion de la chose publique sénégalaise. Il a écarté du sérail du pouvoir tous ceux qui l’ont fait "roi" pour préparer une passation en douceur du pouvoir à Karim WADE. Ce que condamne déjà, de manière unanime, toute la classe politique sénégalaise.
Laurent GBAGBO est également sur les traces de WADE. Après avoir combattu celui que tous les Ivoiriens appelaient le "Vieux", Félix HOUPHOUËT-BOIGNY, il s’est opposé à Konan BÉDIÉ, à Robert GUÉI, le général putschiste de qui il avait ravi le pouvoir avec l’appui de la rue. Alors que Robert GUÉI a voulu s’autoproclamer chef de l’état.  

Après dix ans de règne, lui qui n’avait été élu que pour cinq ans, il n’est pas en mesure de quitter le pouvoir, avec honneur, par la grande porte. Il s’accroche et refuse de reconnaître le vainqueur proclamé par la Commission Electorale Indépendante. Ce qui est dommage pour la jeune démocratie africaine, généralement prise en otage par ceux qui se disent démocrates lorsqu’ils sont dans l’opposition et autocrates une fois assis sur le fauteuil présidentiel.

Laurent GBAGBO s’appuie sur les textes constitutionnels pour justifier son "élection" par le Conseil constitutionnel ivoirienne. C’est peut-être là l’erreur commise par la classe politique ivoirienne, celle d’avoir accepté qu’en cas de non publication, dans les délais, des résultats par la CEI, le Conseil constitutionnel aurait le pouvoir de le faire, dès lors que la CEI ne pouvait que proclamer des résultats provisoires.

Quand on sait que dans nos pays africains, ceux qui se retrouvent dans les différents arcanes institutionnels sont redevables au Chef de l’état, ce fut, à mon sens, une erreur de laisser cette disposition dans les textes organisant les élections. C’est dans cette brèche que s’est glissée Laurent GBAGBO et qui risque de lui redonner une certaine légitimité, ne fût-ce que sur le plan national puisque déjà contesté sur le plan international. 
Comme pour soutenir, que le fait d’être leader de l’opposition ne fait pas nécessairement un démocrate une fois au pouvoir. Les deux cas ci-dessus sont des preuves éloquentes pour que l’on ne croit plus naïvement quiconque se dit opposant politique en Afrique.

Mais, comment peut-on expliquer un tel revirement des opposants politiques, une fois au pouvoir ? C’est une question intéressante qui trouve sa réponse dans l’organisation partisane.
Pas de démocratie sans parti politique démocratique

Pendant longtemps, les politologues n’ont pas accordé une place de choix à l’analyse des partis politiques. Plusieurs auteurs ont mis en exergue l’étude des partis politiques dont Maurice DUVERGER, Richard S. KATZ, Peter MAIR, Wolfgang C. MÜLLER, Thomas POGUNTKE, Luciano BARDI, PANEBIANCO, LIPST, Stein ROKKAN,  Daniel-Louis SEILER, Jean BLONDEL et tant d’autres.

Ils se sont penchés sur l’étude des partis politiques, essentiellement occidentaux. Dès lors, les partis politiques que Max WEBER a qualifiés "des enfants du suffrage universel et de la démocratie" dont leur naissance correspondait à des conditions politiques, culturelles, historiques et économiques précises sont au centre de toutes les préoccupations politologiques et passent aux cribles fins.

Constatant le déficit d’analyse des partis politiques africains, MAMOUDOU GAZIBO professeur à l’Université de Montréal, au Québec, avait coordonné dans la revue Politique africaine de décembre 2006, un dossier important sur l’étude des partis politiques africains que je recommande à ceux que la chose intéresse.

On peut donc retenir que "sans partis politiques, pas d’élection pluraliste". Mais ceci suppose que le parti lui-même fonctionne déjà comme une structure démocratique au sein de laquelle "le leader ne s’impose pas, mais tente de rallier les avis contradictoires" des membres sur base d’arguments efficaces.

Il se fait, malheureusement qu’en Afrique en général, et en RD Congo, en particulier, on prépare le leader à devenir un dictateur dès lors qu’il s’octroie tous les pouvoirs de gestion, voire des épouses des collaborateurs. On  dorlote le leader, on s’interdit toute critique, voire objective, à son encontre puisque nous évoluons souvent dans l’extraordinaireté. D’où le culte de la personnalité que l’on décrit souvent.

Il suffit de voir comment les présidents de partis politiques sont traités pour que la comparaison entre Colons et indigènes refasse surface…Des colons et indigènes de temps modernes, bien entendu. En les traitant ainsi, les leaders se croient être différents des autres membres des partis. Voilà pourquoi nos leaders politiques finissent par se croire éternels au pouvoir, même au-delà des mandats constitutionnels.

Ceux qui ont expérimenté la démocratie nous disent que celle-ci, démocratie, se vit d’abord au sein du parti politique avant de devenir effective dans la pratique gouvernementale. Ils ont déjà franchi le cap familial où les parents peuvent être mis dos au mur par leur progéniture.

Le meilleur exemple est bien entendu celui des pays occidentaux où les différents partis politiques fonctionnent comme des institutions et non comme des boutiques ou entreprises appartenant au leader. Le leader du parti ne s’octroie pas, de manière autoritaire, tous les pouvoirs de décisions. Il travaille en concertation avec les membres à tous les échelons de la vie partisane.

Même si comparaison n’est pas raison, me dira-t-on, il nous faut savoir que nous ne sommes pas seuls à vivre sur cette planète, comme aime à le dire, à raison, monsieur KISONGA MANZAKALA. Le reste du monde nous observe nous vautrer dans notre "démocrature".

Il nous faut relever la tête et analyser objectivement les situations politiques africaines afin de ne plus vivre le spectacle ivoirien. Cessons de mystifier les hommes politiques qui doivent faire l’objet des critiques objectives afin de les aider à mieux gérer tant les institutions étatiques que partisanes.  

En attendant, j’ai peur que la démocratie demeure encore un luxe en Afrique aussi longtemps que nous n’accepterons pas l’existence, dans nos pays, des partis politiques démocratiques. La démocratie n’étant pas un fait automatique et n’étant pas qu’électorale, elle devrait être un style de vie de tous les jours, tant au sein de nos familles respectives qu’au sein des partis politiques, lieux essentiels de l’apprentissage démocratique.

Ceci pour soutenir qu’il n’y aura jamais de démocratie sans partis politiques démocratiques ou sans culture démocratique.

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