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19 octobre 2010 2 19 /10 /octobre /2010 14:09

luvuentendu.jpgLe savoir est défini habituellement comme un ensemble de connaissances ou d'aptitudes reproductibles, acquises par l'étude ou l'expérience. Savoir, c'est peut-être pouvoir, mais à lui seul le savoir ne confère pas beaucoup de pouvoir, comme le confirmera n'importe quel universitaire ou directeur d'une entreprise. Le pouvoir réside dans la volonté d'utiliser le savoir et le savoir-faire nécessaire pour y parvenir.

En fait, peu de gens aspirent au pouvoir ; la plupart veulent du pouvoir sur ce qui se rapporte à leur existence propre de façon à agir à la fois directement et indirectement, tant sur les occupations de leur famille et de l'entreprise pour laquelle ils travaillent que sur la façon dont se conduit l'État dont ils sont citoyens. Certaines personnes partagent le pouvoir naturellement, voire compulsivement ; d'autres en sont avares.

Le pouvoir est tenu en grande estime, aussi aime-t-on le garder pour soi. Il y a à cela plusieurs raisons, entre autres la possessivité (je possède quelque chose que l'autre n'a pas), l'orgueil, la jalousie, l'insécurité, la peur. Il peut s'agir de la peur née d'une menace qui pèse sur l'individu personnellement ou sur sa position ; ou encore sur le corps auquel il s'identifie : sa famille, son entreprise, son pays.

Il est trop facile d'adopter une attitude mi-résignée, mi-cynique, de déclarer "le monde est ainsi fait", ou n'importe quoi d'autre. A ce jeu on risque de perdre tout appétit de savoir, préférer dans certains cas ne pas savoir, de peur que la vérité soit au-delà du supportable.

Avoir peur de s'informer, c'est un peu avoir peur de la liberté de pensée ; aussi embarrassés par l'information que par la liberté, certains préfèrent que d'autres décident à leur place.

Le fait que beaucoup de gens pensent manifestement ainsi en dit long sur notre système d'éducation.

A la longue l'ignorance menace beaucoup plus sérieusement la société que le savoir. Elle est depuis des siècles responsable d'événements atroces, les procès pour sorcellerie par exemple, l'emploi de médications aux effets autrement plus dangereux que la maladie elle-même (que l'on songe seulement aux traitements appliqués au tournant du siècle aux tuberculeux).

L'ignorance conforte la méfiance, aux conséquences souvent pires et qui alimente plus la crainte que la vérité. L'ignorant se coupe du savoir, aliénation qui a provoqué la chute de plus d'un gouvernement. Au plus haut niveau de l'État, l'ignorance peut conduire à la guerre et à la défaite.

Elle freine le progrès, ce que confirment notre manque de compétences et nos difficultés à nous adapter au changement ; il est de surcroît avéré que les travailleurs se montrent à la fois plus motivés et plus productifs lorsqu'on les informe en confiance.

L'ignorance met les ignorants à la merci des démagogues et des ambitieux de tout poil dont ils épouseront les mauvaises causes. Elle leur porte aussi tort personnellement, car en les coupant du pouvoir, en les privant de la capacité d'opérer des choix véritables, elle limite leur existence et s'oppose à la réalisation de leurs potentialités.

Toutes les sociétés qui ont atteint, et conservé, la prospérité à l'époque moderne y sont parvenues en dispensant le plus largement possible l'éducation ; la plupart des États devenus riches grâce à des ressources naturelles comme le pétrole - richesse quelque peu fragile, ainsi qu'on l'a vu récemment -ont utilisé cette aisance à des fins éducatives, manière de reconnaître que le savoir représente une ressource plus fiable et durable.

De même qu'il existe des gens disposés à partager le pouvoir et d'autres qui le conservent jalousement, il y a des partageurs de savoir et des rétenteurs de savoir. Les seconds appartiennent à une espèce assez commune.

Enfants, nous nous sommes certainement tous vantés de connaître "un secret" ; adultes, il nous est arrivé de penser, si ce n'est de dire, "Je sais quelque chose que l'autre ignore".

Les partageurs de savoir sont tout aussi nombreux, de l'individu qui ébruite au hasard, non sans exhibitionnisme parfois, des faits divers ne présentant que peu ou pas d'intérêt ("Je parie que tu ne sais pas... ") à celui qui a à cœur de transmettre des informations pertinentes, importantes, et de communiquer ses idées.

Partageurs de pouvoir et partageurs de savoir ont souvent des personnalités assez semblables, de même que les rétenteurs de pouvoir ressemblent aux rétenteurs de savoir.

Partout où l'on considère que le pouvoir dépend du savoir, ceux qui possèdent le pouvoir détiennent aussi le savoir. Leur principe directeur pourrait s'énoncer ainsi : "Puisque savoir c'est pouvoir, garde pour toi ce que tu sais."

Étant moi-même un compulsif partageur de pouvoir et de savoir, j'estime qu'il est indispensable de distribuer au maximum le savoir et le pouvoir pour garantir la santé de la société. Je ne vois pas comment un pays qui se prétend démocratique peut fonctionner comme tel si ses habitants ne savent pas ce qui s'y passe et pourquoi, s'ils n'ont pas le pouvoir d'agir à cet égard ; car quand on sait ce qui se passe, quand on veut changer les choses et qu'on n'en a pas le pouvoir, tous les ingrédients sont réunis pour générer le malaise et l'aliénation.

C'est bien sûr une des raisons pour lesquelles les gouvernements ne souhaitent pas que le peuple en sache trop. La connaissance est en elle-même dangereuse, ainsi que l'illustre l'histoire du jardin d'Éden.

Est-ce parce que la connaissance devait remettre en cause son autorité que Yahvé le tout puissant craignait de partager son savoir avec les humains, redoutait les conséquences de ce partage sur les humains et sur lui-même ?

Une fois la connaissance dispensée, nul ne sait ce qu'en feront les bénéficiaires. Mais de même qu'Eve ne pouvait pas ne pas avaler sa bouchée de pomme, l'humanité a toujours nourri de l'appétit pour les pommes, ou pour le savoir.

Le pouvoir est dangereux pour ses victimes, car il finit par les démotiver et les démoraliser à un degré tel qu'il arrive qu'elles ne remarquent même pas à quel point leur autonomie est désormais restreinte.

Les membres d'une famille dominée par un père tout puissant ont d'immenses difficultés à grandir et à se prendre réellement en charge. Une entreprise tout entière soumise au contrôle rigide du sommet ne saurait compter sur la responsabilisation du personnel ; il y a des chances pour que les tâches y soient accomplies sans enthousiasme et que sa productivité soit faible.

Dans un pays gouverné par un dictateur peut surgir une forme particulière de dépendance culturelle dès lors que les individus exercent le peu de liberté qui leur est laissé en marge de l'État, en développant le marché noir par exemple.

Cette dépendance affecte aussi les modes de pensée ; quiconque a séjourné plus de quelques jours en Europe de l'Est avant les spectaculaires bouleversements de 1989 y aura noté la propension de plus en plus généralisée à l'autocensure : puisqu'il y a des choses qu'il vaut mieux ne pas dire, autant cesser de les penser.

La démocratie suppose par définition un partage du pouvoir. La plupart des prétendues démocraties sont en réalité des oligarchies soutenues par une (ou des) élite(s), où une certaine fraction de la population se partage le pouvoir dans une plus ou moins grande mesure ; il s'agit de démocraties en ce sens seulement qu'elles tiennent compte de la mobilité au sein (et en dehors) de l'oligarchie et de l'élite et prévoient de temps à autre des élections pour renouveler une petite partie de l'oligarchie.

Dans tous les cas de figures, le pouvoir dépend de l'information, qu'elle ait été obtenue avant ou après l'arrivée au pouvoir.

Le pouvoir politique englobe trois types de savoir, théorique, pratique, psychologique. Le dictateur militaire s'appuie sur la force, mais pour se développer et se déployer la force ne peut se passer du savoir. Le dictateur s'appuie aussi, et dangereusement, sur des renseignements d'ordre privé qu'il obtient par le biais de ses services secrets, officiels ou non ; que cette source vienne à se tarir et ses jours sont en principe comptés. Il choisit parfois d'attribuer des pouvoirs restreints à ses informateurs.

Si c'est une banalité que d'assimiler le savoir au pouvoir, c'en est une autre que d'affirmer, comme lord Acton il y a trois siècles, que le pouvoir a un effet corrupteur. Encore n'ai-je jamais entendu ce lieu commun dans la bouche d'un individu en position de pouvoir.

A vrai dire le pouvoir n'a pas seulement un effet corrupteur, ce qui pourrait suggérer qu'il compromet moralement ceux qui le possèdent et eux seuls ; il est aussi dangereux. Il constitue un danger pour ses possesseurs qui risquent peu à peu de se persuader de leur toute puissance, voire de leur droit moral à décider de tout.

Le pouvoir en soi peut facilement finir par représenter un but suprême, auquel cas ses possesseurs auront alors bien des difficultés à se remettre en cause de crainte de perdre, en même temps que le pouvoir, le sentiment même de leur identité.

Le pouvoir que confère le savoir et son caractère dangereux ont été reconnus dès le IIIe siècle avant Jésus-Christ, quand le conseiller du premier empereur de Chine donna l'ordre de brûler tous les livres qui ne traitaient ni d'agriculture ni de médecine, l'empereur se chargeant pour sa part de faire brûler vifs quatre cent soixante érudits.

Ceux qui s'emparent du pouvoir par la force se conforment généralement au principe selon lequel on ne fait pas de révolution sans briser des nuques, et les premières cibles des nouveaux dictateurs sont presque toujours les intellectuels et les centres universitaires.    

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